Le Ski Augmenté
Le Ski Augmenté : une solution pour limiter la lente érosion du nombre de skieurs ?
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La pratique du ski sera-t-elle encore d’actualité dans 50 ans ? Si tous les regards sont tournés sur la question du changement climatique, la lente érosion du nombre de skieurs inquiète de plus en plus les domaines skiables. Deux chantiers sont engagés : attirer de nouveaux pratiquants et retenir le plus longtemps possible ceux qui sont déjà adeptes. Qu’en est-il de cette deuxième piste ?
Selon le cabinet LHM Marketing, les adeptes des sports d’hiver skient en moyenne 40 ans dans leur vie. Si le pic de consommation se situe entre 30 et 45 ans, la plupart des skieurs ont déjà réduit de moitié leur pratique passée la soixantaine. Pour préserver un marché de 10 milliards d’euros chaque année et rentabiliser des investissements rendus nécessaires par la concurrence des stations étrangères, les stations françaises s’attèlent à recruter de nouveaux skieurs et ces efforts de conquête se concentrent de manière naturelle sur les plus jeunes, notamment au travers du soutien des classes découverte. Il est en effet acquis qu’un enfant ayant connu le ski tôt dans sa vie aura toutes les chances de revenir skier une fois adulte.
Il s’agit néanmoins d’une politique de long terme qui ne suffit pas encore à limiter l’érosion du nombre de skieurs que connaissent les domaines skiables européens et notamment français depuis plus de 10 ans. La démocratisation des voyages au soleil met aujourd’hui la montagne en concurrence avec les cocotiers. Et bien que les forfaits de ski français soient parmi les moins chers au monde, le coût de l’hébergement devient un frein récurrent à la pratique du ski. Viennent enfin les 175 000 blessés chaque année qui souvent arrêtent ou réduisent leur pratique et les babyboomers qui, après avoir été des skieurs réguliers et récurrents, commencent progressivement à déserter les pistes. Cette érosion devient un enjeu majeur à relever puisqu’elle arrive chronologiquement avant le manque de neige.
Sur ces deux derniers points, une nouvelle discipline pourrait inverser la tendance : le Ski Augmenté.
Le ski reste en effet le produit phare puisqu’il représente à lui seul 70% de la fréquentation touristique des stations en hiver. Et si la Cour des Comptes préconisait en 2018 de diversifier « prudemment » les activités touristiques vers des publics « plus âgés ou moins sportifs », les activités annexes proposées par les professionnels du tourisme sont souvent déficitaires ou nécessitent des équipements parfois budgétivores. Heureusement, Laurent Reynaud, Délégué Général de Domaine Skiables de France précise que « les amateurs de ski pratiquent plus longtemps et en bonne santé ». Le Ski Augmenté arrive certainement pour renforcer cette tendance, même s’il s’adresse à toutes les classes d’âge.
Mais de quoi s’agit-il au juste ?
Le ski augmenté consiste à skier avec un exosquelette d’assistance à l’effort. Pratique encore émergeante utilisant une nouvelle technologie facile d’accès, elle connait déjà plus de 10 000 précurseurs en France, skieurs amateurs ou professionnels de la montagne, qui utilisent l’un des deux exosquelettes grand-public qui existent sur le marché. Surtout, cette discipline connait une croissance continue de 75% par an depuis 2014, croissance essentiellement portée par le bouche-à-oreille selon Gabriel Castelain, Directeur Général de Ski-Mojo, principal exosquelette présent sur le marché français. Pour ceux qui n’ont pas encore essayé, utiliser un exosquelette permet d’augmenter l’endurance, les performances techniques et la sécurité du skieur tout en diminuant ou éradiquant ses éventuelles douleurs articulaires. Il s’agit au final d’augmenter son plaisir à skier. Lorsque l’on observe l’essor du vélo à assistance électrique, qui a remis en selle un nombre très important de cyclistes, on peut supposer que le ski augmenté, qui procure des sensations d’aisance et de plaisir très similaires, a déjà un avenir tout tracé.
Plus d’endurance pour une clientèle moins entrainée ou plus senior
L’absence de préparation physique et l’âge sont parmi les facteurs qui réduisent l’intensité et la pratique du ski, passé en moyenne à 4 heures par jour contre 7 heures il y a quelques décennies. Or le ski est l’un des rares sports que l’on pratique encore en tribu ou en famille, à condition que tout ce petit monde puisse suivre le rythme. En venant donner un coup de pouce au skieur augmenté, l’exosquelette permet non seulement de skier plus longtemps dans sa journée mais également dans sa vie, affirme Jean-Marc Glaude, premier importateur européen dans ce domaine. La dimension sportive de la pratique est elle aussi conservée comme le confirme le Dr Benoist Janvier, médecin du sport : « L’effort est toujours présent mais moins intense car au final ce n’est ni plus ni moins qu’une simulation de perte de poids ».
Éviter les blessures et faire revenir les blessés :
Selon l’Association des Médecins de Montagne, 150 000 à 200 000 skieurs se blessent chaque année, ce qui représente environ 2,5% du nombre de skieurs. Et plus d’un tiers de ces blessés présentent des lésions du genou, avec un risque de rupture du ligament croisé antérieur 3,5 fois supérieur chez la femme de plus de 25 ans comparé à l’homme. Aux lésions parfois importantes résultant de ces blessures, se rajoute généralement une appréhension latente qui contribue elle aussi à l’érosion du nombre de skieurs. Coté prévention, en retardant la fatigue qui prédispose aux erreurs techniques, pertes de contrôle et donc aux chutes (la plupart des chutes ont lieu en fin de journée ou milieu de semaine), la pratique du ski augmenté vient réduire la probabilité de se blesser.
Et lorsqu’il est déjà trop tard, ou lorsque l’arthrose rend la pratique sportive difficile, le ski augmenté apporte une nouvelle solution technologique simple pour réduire ou éradiquer les douleurs résiduelles et retrouver confiance. A l’image d’Armand Marchant, jeune skieur belge revenu dans le Top 30 de Coupe du Monde après une grave blessure en 2017, qui a utilisé un exosquelette dans le cadre de sa réathlétisation et qui l’utilise toujours en dehors des compétitions. Sur ces deux paramètres, les domaines skiables ont ainsi la possibilité de conserver plus de 200 000 pratiquants chaque année, et ainsi mettre un terme à l’érosion du nombre de skieurs.
Sur ces deux paramètres, les domaines skiables ont ainsi la possibilité de conserver plus de 200 000 pratiquants chaque année, et ainsi mettre un terme à l’érosion du nombre de skieurs . « Pour devenir skieur, il faut être initié par quelqu’un » précise Jean-Pierre Rougeaux, maire de Valloire et secrétaire général de l’Association Nationale des Maires de Stations de Montagnes (ANMSM). Et c’est justement à cette clientèle d’amoureux du ski et désireuse de transmission que le Ski Augmenté apporte une solution. Les stations ont aussi la possibilité de créer une nouvelle discipline récréative pour une clientèle de tout âge à la recherche de nouveauté et de performance dans un secteur qui n’a jamais vraiment évolué technologiquement depuis l’arrivée du ski parabolique dans les années 90. C’est en tous cas le pari qu’a fait l’Alpe d’Huez l’an dernier.
Déjà de premières compétitions de ski augmenté :
Sous le parrainage d’Ophélie David (64 podiums en Coupe du Monde dont 26 victoires), l’Alpe d’Huez a lancé l’an dernier une compétition hors norme : les Championnats du Monde de Ski Augmenté. Avec des participants venant de France, du Canada, du Royaume Uni, de Belgique et même d’Australie, cette manifestation, pour l’instant ouverte à tous, a rassemblé une cinquantaine de participants âgés de 24 à 81 ans. Ophélie David en attend au moins deux fois plus les 16 et 17 janvier prochain ; les inscriptions sont déjà ouvertes.